Dans les années 80, mon père et nous ses enfants, nous nous rendions régulièrement au village pendant les vacances. D’Abidjan à Krozialé dans le département de Zouan-Hounien, la distance pour qui connait le pays, est très longue. Mais la joie de retrouver les grands-parents nous donnaient la force et la patience nécessaires. Une fois au village, la tradition et notre culture prenaient toute la place. On était très souvent accueilli par le masque du village comme pour nous dire bonne arrivée, et qu’il sera notre protecteur pendant tout le séjour. La joie et la bonne humeur remplaçaient la fatigue et les courbatures occasionnées par le trajet jusqu’à ce village dans l’ouest montagneux de la Côte d’Ivoire.
Tous appréciaient la prestation du masque. Dans notre village d’ailleurs le masque a une fonction primordiale. Il est donc sacré.
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Les chanteuses avec leurs voix mélodieuses soutenues par des tambours donnaient envie de danser. Nous nous sentions véritablement chez nous. Mes frères et sœurs et moi étions en phase avec notre tradition. Notre culture s’exprimait en nous. Le masque était une fierté pour notre village et tous l’aimaient, naturellement.
Mais aujourd’hui, beaucoup a changé. Avec la modernité, les villages commencent à ressembler à des villes. Un changement qui se fait avec son lot de tracas et des réalités tant au niveau social, économique que culturel. De moins en moins on voit des troupes de danses traditionnelles prester dans nos villages. Et lorsqu’on en voit, il y a beaucoup de touches de modernité.
L’exemple le plus frappant à partager avec vous est la prestation des masques échassiers. Ces êtres qui sont les interfaces entre le spirituel et le physique sont de plus en plus invités dans les cérémonies de mariages ou d’anniversaires. On en voit même souvent danser au son des musiques modernes, précisément du coupé décalé.
Les masques échassiers ne dansent -il plus au son du tam-tam traditionnel et des grelots ? A-t-on une fois vu dans d’autres parties du pays profond, des symboles culturels abandonner leur rythme de base pour le coupé décalé ?
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Autant de questions à se poser. Et dont les réponses permettront sûrement de savoir s’il convient d’adopter ce changement ou y mettre fin.
Ce que je pense, c’est que notre culture est notre identité. Nous nous devons de la préserver contre vents et marées. Aujourd’hui, du costume aux pas de danses, tout tend à être modernisé. En tant que DAN, on a souvent du mal à se retrouver. Devons-nous être modernes à tout prix et/ou à tous les prix ?
Devons-nous conserver notre culture et aspirer à nous développer en se basant sur elle ? Faisons le bon choix.
Une contribution de Tié Kuiguiao Tohoueigbeu
Agent à la direction régionale de la Culture et de Francophonie du Worodougou
Fils de Krozialé, département de Zouan-Hounien
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