C’est la rentrée scolaire 2024-2025 partout en Côte d’Ivoire dans ce mois de septembre 2024. Mais rejoindre son lieu de travail n’est pas facile pour tous. Dans la région du Tonkpi comme un peu partout dans le pays, les enseignants vivent un véritable calvaire pour aller dans les villages où ils exercent du fait de la dégradation des routes. Ouestmedia.ci a suivi certains d’entre eux.
Dan Jean est instituteur dans le primaire public. Zonle 1 dans la sous-préfecture de Gbangbegouiné-Yati, département de Man est son lieu de service.
Ce lundi 16 septembre 2024, il rejoint son poste pour commencer les cours.
À Man où il réside, il saute dans un taxi au niveau du feu tricolore au quartier Sari. Après 20 minutes de route, il est Gbangbegouiné-Yati chef-lieu de sous-préfecture.
À ce stade de son déplacement, un changement s’opère au niveau du moyen de mobilité.
Il ne peut que continuer le chemin à moto. L’instituteur se résout donc à cette solution pour aller à Zonle 1, village distant de presque 10 km du bitume.
DE LA BOUE, DES PIEDS À LA TÊTE
Il est 7 h 45 min quand il s’assoit avec délicatesse derrière un conducteur d’un engin à deux roues.
Dans cette région et probablement ailleurs, les motos sont les seuls moyens de déplacement qui défient les pistes boueuses et glissantes.
Ayant l’information de l’état de dégradation de la route, l’enseignant s’est mis dans des conditions que requiert la situation.
Aux pieds, il a une paire de chaussures particulière. Il s’agit des « Laikaire ».
En temps de pluie et principalement sur des pistes villageoises comme celles où il va passer, ce sont ces chaussures qui sont adaptées.
La piste en question n’a jamais eu la visite d’un engin pour sa réfection depuis des décennies, nous informe-t-il.
« La route qui mène au village fait environ 10 km. Mais je vous assure que pour y aller il faut s’apprêter sur tous les plans.
Tellement la route est défectueuse, même à moto, on est parfois obligé de descendre pour pousser la moto sur environ 500 mètres. C’est pénible ce que vivons pour aller enseigner dans les village« , dit-il sur un air un peu dépité.
Sur le chemin, la boue est omniprésente. La moto qui le transporte peine même à avoir une bonne adhérence au sol.
L’engin patine par endroits. Comme déjà prévenu, après quelques kilomètres, il faut mettre pied à terre, du moins, dans la boue, pour pousser la moto.
À l’arrivée, après plus d’une heure de route, c’est presque couvert de boue, lui et ses bagages, qu’il descend de l’engin à deux roues.
Ce spectacle, cet instituteur révèle qu’il le vit à chaque déplacement pour entrer et sortir de Zonle 1. Surtout en période de pluie.
Dan Jean n’est pas le seul à connaître cette difficulté. Tout comme lui, ses collègues et autres fonctionnaires dans les autres localités de la région vivent la même situation.
LES PLUIES ACCENTUENT LA SITUATION
C’est le cas dans le département de Biankouma. Là-bas, selon des enseignants, pour le même problème de route, les conseillers pédagogiques ne se rendent presque jamais dans les villages de leurs zones de couverture durant l’année scolaire.
« Je suis dans la zone de Biankouma depuis pratiquement 5 ans. Ma première année, où je devais être titularisé, mon conseiller qui devait me suivre, ne pouvait même pas arriver chez moi.
Pour me noter, il fallait donner mes fiches pratiques à un jeune qui rallie mon village à Biankouma et les remettre au conseiller pour la suite.
C’est vraiment difficile de vivre dans cette zone en tant que fonctionnaire. Cette année avec la montée de la pluviométrie, je me demande si je peux arriver dans mon village avant la fin de ce mois« , s’inquiète un enseignant sous le sceau de l’anonymat.
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Dans les sous-préfectures de Blapleu et de Santa, département Biankouma, la situation est pareille.
Entre Gbombelo et Gama, il est difficile de se déplacer. De Blapleu à Santa et les autres villages après, c’est un véritable parcours du combattant.
DANANÉ N’ÉCHAPPE PAS À CE SOUCI DE ROUTE…
Le département de Danané n’échappe pas à ce souci de route. L’exemple du tronçon Danané-Daleu est convaincant en la matière.
depuis des lustres, cette route demeure un casse-tête pour les décideurs. Les enseignants et parents d’élèves en souffrent.
« Nos parents et les fonctionnaires qu’on envoie ici souffrent énormément. Depuis des années, cette route nous fatigue.
Le reprofilage lourd ne peut rien faire. Il faut le bitume pour mettre fin à la souffrance de nos parents et à tous ceux qui officient dans cette zone« , souhaite un natif de Daleu.
…BIANKOUMA ET SIPILOU NON PLUS
Selon des témoins, c’est à leur corps défendant que des fonctionnaires affectés dans cette partie de la région acceptent.
« Quand tu apprends qu’on t’a affecté à Sipilou, c’est avec des un pincement au cœur que tu reçois la nouvelle.
Mais que faire ? C’est aussi la Côte d’Ivoire. Nous sommes donc obligés de nous y rendre.
Mais dans des conditions difficiles« , déplore Mohamed Cissé, un instituteur dans la zone.
Depuis plus de deux ans, le tronçon Biankouma-Sipilou est en construction. En attendant la fin des travaux et la livraison de la route, les populations vivent un calvaire.
Les fonctionnaires exerçant dans les zones reculées de la région implorent les décideurs afin de se pencher sur la question des routes pour la bonheur et l’épanouissement de tous.
Ashley Oulaï à Man
OM – 9/24
Mail : contact@ouestmedia.ci
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